Environnement

L’environnement envisagé par les géographes, ne recouvre pas la seule nature au sens restreint du terme, il n’est pas synonyme de géographie physique, pas davantage de faune et de flore, ce que l’on nomme aujourd’hui la biodiversité, pas plus que de pollutions et de dégradations. Il désigne les relations d’interdépendance complexes existant entre l’homme, les sociétés et les composantes physiques, chimiques, biotiques d’une nature anthropisée que George Bertrand a proposé de nommer « géosystème » (G. Bertrand et Cl. Bertrand 2002).
Ce terme a été employé par les géographes comme synonyme de « milieu géographique ». C’est dans ce sens qu’E. Reclus l’utilise dès la fin du XIXe siècle ainsi qu’«A. Demangeon» dans les années 1940. Ce terme recouvre à la fois un milieu physique et un système de relations, un champ de forces physico-chimiques et biotiques en interrelation avec la dynamique sociale, économique, spatiale. Les Commnunautés européennes définissent l’environnement comme « l’ensemble des éléments qui dans la complexité de leurs relations constituent le cadre, le milieu et les conditions de vie pour l’homme »
En droit français de l’environnement, le terme recouvre la nature, c’est-à-dire les espèces végétales et animales, les « équilibres » biologiques et les ressources naturelles (eau, sol, air, minerais, énergies fossiles) ainsi que les sites et les paysages (loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, loi du 19 juillet 1976 concernant les installations classées pour la protection de l’environnement, première loi à utiliser ce terme dans son titre).

Pour les géographes, l’environnement est un objet social qui intègre des données et des phénomènes sociaux associés à des éléments « naturels » dans un construit en quelques sorte « hybridé » pourvu d’une double dimension spatiale et temporelle. Cette dimension temporelle est fondamentale dans l’étude de l’environnement ou du géosystème. Elle permet de souligner l’importance des héritages, spécifiquement naturels (ressources parfois non renouvelables, formes héritées du paysage qui composent ce que l’on nomme des paléo-environnements…), ou liés à l’anthropisation (modification des couverts végétaux, sélection des espèces végétales et animales pour l’agriculture et l’élevage…, pollutions).
Cette analyse permet de souligner que la planète ne porte pas d’environnements qui n’aient pas été à des degrés divers « modifiés » par les sociétés. Insister sur l’anthropisation de la planète pose naturellement la question du statut de l’homme dans la nature. Pour certains écologistes radicaux, l’homme est toujours celui qui dégrade l’environnement, qui perturbe les « paysages naturels » ou les milieux naturel, ce qui revient à considérer l’homme comme un intrus dans la nature.
L’environnement est à la fois un « donné, un perçu, un vécu » si l’on suit André Dauphiné (A. Dauphiné 1979). Le donné fournit des ressources aux sociétés et peut être responsable de contraintes ou d’aléas affectant les groupes sociaux. Contraintes et risques doivent pourtant être envisagés à un moment donné du développement économique, technologique, social. Ce ne sont pas des données « objectives », à envisager en soi. L’environnement est aussi un cadre de vie, un produit de l’homme et de la société qui nécessite d’envisager les aspects historiques et culturels des sociétés. De ce point de vue, la perception et les représentations que les sociétés ont de la nature varient selon les cultures et selon les époques à l’intérieur d’une même aire culturelle.

Pour la géographie, société et nature (ressources, paysages..) sont indissociables, il convient donc de gérer les «interactions» avec discernement et de manière durable. Mais toute transformation de la nature n’est pas obligatoirement catastrophique, tout aménagement n’est pas systématiquement dramatique ; certes, il faut envisager des «seuils» à ne pas dépasser pour que les aménagements ne dégradent pas les ressources et plus largement la nature. Ces seuils doivent être établis en fonction du niveau de développement, des données socio-économiques, techniques et culturelles qui caractérisent à un moment de son histoire le groupe social. Y .Veyret a proposé de nommer « géoenvironnement » la conception géographique de l’environnement pour en souligner la spécificité (Y.Veyret 1999)

Voir aussi : anthropisation, nature/culture, anthroposystème, développement durable

 

-Bertrand G et Bertrand Cl. 2002, Une géographie traversière. L’environnement à travers territoires et temporalités. Paris Edition Arguments
-Dauphiné A. 1979, Le concept d’environnement. Analyse spatiale, p. 25-34. Paris
-Veyret Y. 1999, Géoenvironnement. Campus. Colin (2e édition 2003)