Volcan

Un volcan peut être défini comme un «relief» où le magma en fusion atteint l’écorce terrestre, en situation continentale ou sous-marine. Ce relief peut être un édifice de forme plus ou moins conique et de taille très variable ou encore une dépression, lorsqu’il n’y a qu’un cratère ou une caldeira. Selon le type de magma (plus ou moins fluide, plus ou moins différencié), la situation sous-marine ou continentale et, dans ce dernier cas, la présence ou l’absence d’eau en surface, son arrivée en surface peut donner lieu à une accumulation de lave (éruption lavique) ou à une explosion (éruption explosive, responsable du dépôt de pyroclastites ou tephra). Un volcan actif désigne un édifice dont on connaît au moins une éruption historique. Selon le Global Volcanism Program (Smithsonian Institution), il y aurait 550 volcans répondant à cette définition, sans compter l’activité sous-marine. Cependant, l’exemple de Pinatubo (Philippines) montre la limite d’une telle définition, puisque ce volcan était considéré comme inactif avant l’éruption de 1991 qui fut l’une des plus importantes du 20e s. en termes de volume de produits émis.
A l’«échelle» du globe, la «localisation» est déterminée par la tectonique des plaques lithosphériques. Les principaux volcans sont localisés au niveau des zones de subduction (arcs insulaires et Ceinture de feu du pacifique) et des dorsales océaniques (Islande). Certains volcans se localisent également en contexte intraplaque, en relation avec la formation de rift ou l’existence de points chauds, ou encore en contexte de collision (Caucase). A plus grande échelle, l’alignement souvent observé des édifices volcaniques selon des directions préférentielles (par exemple dans la Chaîne des Puys) témoigne également de l’importance de la tectonique qui guide la remontée du magma.
En occident, les volcans sont connus depuis l’antiquité et de nombreuses éruptions ont été décrites dans le bassin méditerranéen par les auteurs classiques. La plus célèbre de ces descriptions reste sans doute celle de Pline-le-Jeune observant l’éruption du Vésuve de 79 ap. J.C. qui détruisit Pompéi et Herculanum. Cependant l’explication géologique de l’activité volcanique a longtemps été discutée.
A partir du 18e s., deux théories vont s’opposer pour expliquer l’origine des volcans. Selon le neptunisme, l’activité volcanique est un phénomène superficiel sans relation avec les profondeurs de la terre. A l’inverse, selon le plutonisme les roches volcaniques ont une origine magmatique profonde. Dès 1752, J.E. Guettard reconnaît dans le Puy de Dôme et la pierre de Volvic une origine volcanique profonde. Le plutonisme va progressivement s’imposer, notamment à partir du milieu du 19e s. avec les progrès des analyses physiques (observation au microscope polarisant) et chimiques.
La volcanologie moderne va rapidement progresser avec l’observation de grandes éruptions permettant l’analyse des «processus» volcaniques et des formations associées. Ainsi, au 20e s., deux grandes éruptions, parmi d’autres, vont faire considérablement progresser les connaissances : celle de la Montagne Pelée (1902) et celle du Mont Saint Helens (1980).
Classiquement, on distinguait quatre types d’activité volcanique en fonction de la viscosité des laves et des phénomènes explosifs : hawaïen, strombolien, vulcanien et péléen. Cette typologie est aujourd’hui abandonnée car :
– i) elle ne rend pas compte de la diversité des types de volcan et des activités volcaniques (ainsi les maars et l’activité phréato-magmatique, les volcans de lave ou encore le volcanisme sous-marin) ;
– ii) au cours de son histoire, un édifice polygénique peut connaître divers type d’activité.
Actuellement, il est d’usage de distinguer les édifices monogéniques (cône strombolien, dôme, maar) des édifices polygéniques (volcans composites, volcans bouclier). Ces deux catégories se distinguent (partiellement du moins) par les échelles spatiales et temporelles de leur activité. Les premiers sont de « petits » édifices constitués au cours d’une période de temps « courte », et –en théorie- au cours d’un seul cycle éruptif, caractérisé par un seul style éruptif. Au contraire, les seconds sont des édifices constituant des formes majeures, actifs pendant des centaines de milliers d’années et montrant une grande diversité des styles éruptifs. Les phases d’activité volcanique succèdent à des phases de répits, de même que des phases de construction (accumulation de lave) succèdent à des phases de destruction (activité explosive et émission de pyroclastites, formation de caldeira).
Dans son ouvrage de 1958, L’homme et les volcans (coll. Géographie humaine, Gallimard), E. Aubert de la Rüe est le premier géographe français à offrir une synthèse sur les espaces volcaniques. Après avoir décrit la diversité des éruptions et des édifices et après avoir présenté les divers domaines volcaniques dans le monde, l’auteur intitule la sixième et dernière partie de son ouvrage « le volcan utile ».
Les volcans peuvent, en effet, abriter des «ressources» («énergie» et matières premières). Les laves sont utilisées dans l’architecture (cf. par exemple la cathédrale de Clermont Ferrand en pierre de Volvic) ou, plus anciennement, pour la création d’artefacts préhistoriques. L’obsidienne a ainsi constitué une ressource recherchée par les groupes humains paléolithiques et néolithiques et dès le néolithique, elle a fait l’objet d’un commerce concernant l’ensemble du Moyen-Orient (Cauvin et al. (dir.), 1998). Sur les versants des volcans, l’agriculture a pu bénéficier de sols souvent fertiles, notamment développés sur laves basiques. De même, les cendres volcaniques apportent aux sols des éléments nutritifs (azote, potassium, etc.) qui contribuent à la fertilité de ces régions. En domaine tropical, les fortes densités rurales d’Indonésie ou des Philippines témoignent à leur tour de la richesse de beaucoup de ces sols développés sur les versants volcaniques. Aujourd’hui, certaines roches volcaniques, telles que la perlite (obsidienne hydratée) ou la ponce sont utilisées dans l’industrie.
Lieux mythiques, les volcans ont, en outre, accueilli de nombreuses légendes et ont souvent été associés aux divinités, comme en témoignent les temples qui surmontent nombre d’édifices volcaniques. Les légendes et mythologies associant les volcans aux divinités se retrouvent dans diverses civilisations, de l’antiquité méditerranéenne à la Nouvelle-Zélande en passant par l’Amérique pré-colombienne ( De Wever, 2003). De nos jours, les «paysages» volcaniques bénéficient souvent d’une image positive et attirent un certain tourisme en domaine insulaire (des îles Eoliennes à la Réunion, sans oublier les archipels de l’océan Pacifique) ou continental (Yellowstone par exemple).
Ces ressources fournies par les volcans expliquent qu’ils aient pu attirer de fortes densités humaines, malgré les risques associés à l’activité volcanique. Il est d’usage de distinguer sept aléas volcaniques : coulée de laves, retombées de cendres et de blocs, écoulements pyroclastiques, gaz, lahars, avalanches de débris et tsunamis. La gestion du risque volcanique repose sur l’identification des signaux précurseurs (émanation de gaz, éruption de vapeur, activité sismique, etc.) caractéristiques de la remontée de magma dans la cheminée, ainsi que sur la reconnaissance du type d’éruption. La catastrophe d’Armero, lors de l’éruption du Nevado del Ruyz (1985) responsable du fonctionnement de lahars ayant causé plus de 20 000 décès, est un parfait contre-exemple. Si les signaux précurseurs avaient été bien repérés par les scientifiques (fonte de la calotte glaciaire au sommet du volcan), l’information auprès de la population d’Armero a été à la fois insuffisante et imprécise. La population est restée calfeutrée ce qui aurait été utile en cas d’éruption plinienne, alors que l’aléa « lahar » exigeait, au contraire l’évacuation des populations vers les interfluves. La désorganisation de l’Etat colombien est bien sûr en grande partie responsable de cette information déficiente (Voight, 1990).
Les éruptions volcaniques sont des phénomènes instantanés dont les produits fossilisent aussi bien les paléo-topographies que d’anciennes occupations humaines. Les téphras sont donc souvent utilisés pour les reconstitutions géomorphologiques, paléoenvironnementales ou (géo-)archéologiques, notamment quand ces produits peuvent être datés par des méthodes radiométriques («géochronologie»). En géomorphologie, les coulées de lave éventuellement exhumées par l’érosion (planèzes) sont utilisées pour reconstituer l’évolution régionale (en Limagne, par exemple). De nombreux, sites archéologiques sont datés grâce aux pyroclastites associées au fossiles : par exemple, le site de Dmanissi (Géorgie) a livré les plus anciens fossiles européens d’homo, datés grâce à une couche de cendre volcanique de 1,81 Ma (de Lumley et al., 2002). En outre, certains téphras particulièrement bien connus, sont recherchés dans les séquences sédimentaires (marines ou continentales) afin de servir de marqueurs chronostratigraphiques. Le Laacher See Tephra (provenant de l’éruption d’un maar de l’Eiffel, Allemagne, ca. 12900 ans BP) est utilisé dans toutes les reconstitutions concernant le Tardiglaciaire de l’Europe de l’ouest de l’Italie à la Scandinavie. De même le téphra de Santorin (dont l’éruption, datée de ca. 1645 av. JC., a pu mettre fin à la civilisation minoenne et nourrir le mythe de l’Atlantide) est un niveau de référence dans tout la Méditerranée orientale, la mer Noire et l’Anatolie occidentale.

Voir aussi: «Fixisme, Mobilisme»

 

-Aubert de la Rüe, E., 1958. L’homme et les volcans. Gallimard, coll. Géographie humaine, Paris, 398 p.
-Cauvin, M.-C. et al. (Editors), 1998. L'obsidienne au Proche et Moyen Orient. Du volcan à l'outil. Maison de l'Orient Méditerranéen, 388 p.
-de Lumley, H. et al., 2002. Datation par la méthode 40Ar / 39Ar de la couche de cendres volcaniques (couche VI) de Dmanissi (Géorgie) qui a livré des restes d'hominidés fossiles de 1,81 Ma Comptes Rendus Palevol, 1(3): 181-189.
-de Wever, P. (Editor), 2003. Le volcanisme : cause de mort et source de vie. Vuibert - Muséum national d'histoire naturelle, Paris, VIII-328 pp.
-Voight, B., 1990. The 1985 Nevado del Ruiz volcano catastrophe: anatomy and retrospection. Journal of Volcanology and Geothermal Research, 44(3-4): 349-386.